Des dizaines de bateaux
Bateaux de loisir, bateaux de croisière, bateaux restaurant
Pas une seule péniche à cette heure
Rien que des transports à moteur de plaisir
Laissant de leur éphémère passage un roulis, des flons-flons, et une odeur de pétrole
Il y a même un bateau-boîte
Qui passe toutes baies vitrées ouvertes
Des gens bien habillés s’y trémoussent et s’y exhibent
Conscients d’être des privilégiés
Sous les arches des ponts les statues
Trempent un orteil nonchalant
Dans la fraîcheur de cette fin d’été et de semaine
Ou se dénudent le sein discrètement
Sur les berges
Les quatre berges qui longent l’île de la Cité et l’Ile Saint-Louis
Des dizaines, des centaines, des milliers
De jeunes et peut-être de moins jeunes
Silhouettes font la tête
Gratuitement
Assises sur le quai
Debout autour de DJs improvisés
Les ombres dansent la salsa
Le madison ou le n’importe quoi
Les jeunes ombres boivent, elles bavardent et péchotent
Un ou deux garçons même, en caleçon, piquent une tête dans l’eau
Pour épater des filles
Qui ne les regardent pas
Ils boivent une bonne tasse de gaz oil aux déjections
Et de revigorante liberté
La rumeur infinie des voix humaines se mêle au flux du fleuve
Cette nuit sur les berges de la Seine
Le virus doit circuler à une vitesse folle
Que fait la police ? Rien
Au moins ça évitera des noyades
C’est le virus de la fête et le virus de la paix
C’est le virus de la vie
C’est un immense centre de vaccination contre la déprime
On y recherche l’immunité collective par les contacts rapprochés et les embrassades