Dimanche 9 juin 19

Rien de plus passionnant, de plus emporté, de plus multiple, de plus tempétueux que le gris. De plus romantique.
La musique que j’écoute par hasard ce matin (la violoncelliste Sonia Wieder-Atherton jouant la Sonate Arpeggione de Schubert) entre soudain en résonance avec le paysage que j’ai sous les yeux et m’ouvre un instant l’âme pour monter jusqu’à lui.
Certains gris tirent délicatement sur le jaune, d’autres violemment sur le rouge, le beige, le noir, le blanc.
Dans certains ciels des dizaines de nuances sublimes de gris bleus se superposent sans se mêler tout à fait.
En voiture, à la cantine, je lève les yeux et je regarde les ciels gris de ce mois de juin pourri en me demandant en quoi chacun est somptueusement à nul autre pareil. Celui-ci par exemple ?

Ou celui-là, se déchirant un instant sur de l’azur?

Le gris couleur injustement méprisée. Dite couleur de l’ennui et de la routine par ceux, dont moi souvent, qui ne savent pas regarder. Dite couleur de l’uniformité par ceux qui ne savent pas distinguer.
Le gris couleur de l’harmonie, qui n’est pas l’uniformité mais le subtil mélange des différences.
La femme aux yeux de peintre qui partage ma vie me réconcilie avec le gris.
Je voudrais qu’ils m’apprennent à l’apprécier à ses justes mesures.
Les cinquante mille nuances du quotidien si merveilleusement gris.