PARLER DE VerNON SUBUTEX

Lundi 2 mars 20

Pour son oral, une des élèves que le professeur Normal interroge a choisi de présenter Vernon Subutex, de Virginie Despentes. Elle en parle très bien. Notamment de la narration. Le fait que chaque chapitre soit centré sur un personnage différent, dont certains se contredisent : par exemple, le chapitre centré sur Sylvie, qui raconte le début d’une grande passion fusionnelle avec Subutex, tandis que, dans le chapitre suivant, Vernon raconte le cauchemar qu’il est en train de vivre avec cette femme qui ne lui laisse pas un moment pour respirer et lui fait peur et va le forcer à s’enfuir.

L’élève n’a que peu besoin d’être guidée pour donner du sens à ce choix narratif : des fragments éclatés de la société, que plus rien ni personne ne réunit. L’incommunicabilité.

Et elle annonce à Normal que, dans le deuxième tome (ah bon, elle l’a lu aussi, il existe encore de bons lecteurs ?), Subutex essaie de réunir ces différents points de vue éclatés « grâce aux réunions dans le jardin public ».

Elle lui lit aussi le passage final, la poétique énumération des « Je suis » qui l’a frappé lui aussi. Ils s’accordent à dire qu’ici la narration à la 1ière personne est surprenante mais parfaitement justifiée : Vernon, le SDF en plein trip, n’est plus personne, et c’est pourtant dans ce moment de perte de soi qu’il est capable de se mettre à la place de l’autre et de joindre ces différents fragments humains d’une même réalité brisée.

En fait, l’élève et le professeur discutent ensemble à bâtons rompus de cette œuvre qui leur a plu à tous les deux. Alors il lui colle 8/8. Pour le plaisir si rare d’avoir pu finir les phrases que commençait une adolescente sans la trahir et discuter littérature en plein milieu d’une épreuve de littérature.