Samedi 7 décembre 19

Kader Attou et Mourad Merzouki (dont Ulysse ne manque aucun spectacle aux Gémeaux depuis qu’il a été ébloui par Pixels), se sont unis pour chorégraphier une dizaine de jeunes danseurs marocains. Le résultat est Danser Casa : un spectacle d’une énergie folle et plein d’acrobaties, qui court le monde depuis deux ans.
Musique moderne mais inspirée de la tradition marocaine, percussive, emballante. Des trouvailles, comme ces chaussures à filaments rouges qui brillent seules dans l’obscurité dans un ballet de pas. Et puis surtout un engagement total de ces jeunes artistes dans la performance et vrai plaisir à s’imposer au public, qui, d’ailleurs, leur fait un triomphe.
Les chorégraphes se sont inspirés de la personnalité de ces huit danseurs pour créer le spectacle, qui dit bien la vision que ces jeunes ont de leur ville : les affrontements, le défi permanent, la violence, la brusque fraternité aussi, presque trouble, qui peut terminer un geste d’agression, et les moments de fête collective.
Il y a une seule fille dans le groupe, Stella Keys, une Noire, qui se mêle à la danse agressive de ses camarades. Vers la fin du spectacle, elle a un solo aussi, et sans doute tente-t-elle d’ouvrir sur un univers différent mais ce n’est pas très clair (même si la choré de groupe qui prolonge le solo explore plus l’idée de construire ensemble que celle de s’affronter les uns les autres). Peut-être la limite du spectacle : ces jeunes artistes marocains disent beaucoup sur la fièvre rageuse qui vrille leur ville et leur pays aujourd’hui, mais peu sur l’amour, le couple, le féminin, l’intime.
Ulysse sait que le hip hop est originellement fondé sur le défi, mais doit-il rester enfermé dans cette vision du monde finalement très masculine et adolescente ? Quel serait le défi dans la relation homme/femme que le hip hop serait capable de dire (au Maghreb et ailleurs) ?
Ulysse a été touché par le plus grand de ces jeunes gens, celui à la coiffure rasta. Il apporte quelque chose de différent : moins athlète, plus danseur. Une expressivité presque théâtrale ou cinématographique, qui lui a rappelé, il ne sait pourquoi, dans le mélange de présence très contemporaine et d’indéfinissable distance, ce jeune acteur métis vu dans deux ou trois films français ces dernières années, Corentin Fila.